Ses fils en Allemagne, il se bat pour ses droits

Article de Éléonore Bohn, publié le 15/09/2017 dans le quotidien Ouest-France

Fabien Le Coutey se heurte depuis dix ans à l’office de la jeunesse allemande. Ses deux fils, français, vivent en Allemagne avec leur mère.

Fabien Le Coutey regrette le manque de soutien du gouvernement français.

Une semaine à Noël, trois semaines durant les vacances d’été, une semaine à Pâques et un couloir d’appel le mardi soir. Ainsi se résument les droits de père de Fabien Le Coutey. Ses deux garçons, français, nés à Vannes, âgés de 15 et 11 ans, vivent en Bavière avec leur mère.

Il n’imaginait pas, en 2007, lorsqu’il se sépare de sa femme, française, qu’elle referait sa vie en Allemagne. En août 2008, elle franchit le Rhin avec ses fils, âgés de 6 et 2 ans. Il porte plainte au commissariat pour enlèvement. « On m’a conseillé de monter une équipe pour aller chercher mes enfants », se souvient-il.

Un bras de fer s’engage entre les deux parties, pendant environ huit mois, jusqu’au moment où l’on diagnostique au père de Fabien Le Coutey, une grave maladie. Éprouvé et fragilisé, le Vannetais signe un accord en 2009, qui lui octroie dix semaines par an avec ses enfants. Une décision qu’il regrette car, une fois le divorce prononcé en 2010, il n’a plus d’outils juridiques à sa disposition.

« Aujourd’hui, mon fils me rejette »

La donne change début 2016. Fabien Le Coutey est convoqué devant la justice allemande, car son fils aîné, 15 ans, ne souhaite plus le voir. Chose possible outre-Rhin, si l’adolescent est dans sa quatorzième année. Obligé de se présenter, au risque d’essuyer une amende de 1 500 €, le Breton est incapable de comprendre ou de s’exprimer dans la langue de Goethe. Faute d’aide juridique française, à dix jours de l’audience, l’association Enfants otages lui indique un avocat français, Me Revel. Installé en Allemagne, il est spécialisé dans le droit des familles.

Devant le tribunal, en mai 2016, le père apprend que ses fils ont été entendus par le Jugendamt (Office de la jeunesse allemande). L’avocat des enfants parle de « manipulation », en désignant la mère et son conjoint. Mais la justice allemande estime qu’il y a « trop de périodes de vacances chez leur père ». Sur les six visites, il n’en reste plus que quatre. Et l’aîné accepte de venir à Noël et aux grandes vacances. Sauf que… « cela fait un an et demi que je ne lai pas vu, il nest pas venu. Et refuse le dialogue depuis le début de lannée, relate Fabien Le Coutey. Aujourdhui il me rejette. » Sa crainte est de voir le même scénario se répéter d’ici deux ans, avec son deuxième fils.

L’homme de 49 ans oscille entre incompréhension et colère. « Cest lamentable, il y a une complicité de l’État français, qui se laisse faire par lAllemagne. » Son crédo aujourd’hui est de faire connaître son histoire, mais pas uniquement, celles aussi des autres, des parents avec qui il entretient des échanges quasi quotidiens, via l’association Enfants otages.

« Jarrête de me battre contre le système allemand. Les enfants sont protégés par les lois allemandes, mais protégés de quoi ? On est traité comme des criminels. »

Rapt d’enfant : quand le juge allemand passe à l’acte

Décidément, dans ce domaine, les tribunaux allemands ne connaissent pas de limites et ne cesseront de nous surprendre, malheureusement…

Dans l’affaire de Séverine, le juge allemand du tribunal de Saarburg (Rhénanie-Palatinat) a vraiment dépassé les bornes. Non content d’organiser un rapt, il est aussi passé à l’acte en enlevant lui-même un enfant de 5 ans à sa mère.

En effet, rappelons qu’en Allemagne, lorsqu’un couple n’est pas marié, si la mère n’en a pas expressément décidé autrement, elle est seule détentrice de tous les droits parentaux sur son enfant. En cas de séparation, elle peut en toute légalité, refuser un droit de visite au père (ce n’est pas ce qu’a fait Séverine) et déménager avec son enfant, où bon lui semble.

En d’autres termes, si Séverine avait été allemande, le juge se serait purement et simplement déclaré incompétent et aurait rejeté la requête du père allemand qui demandait que l’enfant habite avec lui, puisqu’il n’avait aucun droit sur cet enfant.

Il a ensuite usé de son statut et de son autorité de juge pour intimider Séverine et la convoquer en lui demandant de se présenter à une audience de conciliation et d’amener son enfant avec elle.

Nul n’est besoin d’être devin pour savoir ce que le juge allemand a fait ensuite…

Profitons-en pour saluer l’intervention de l’eurodéputé Edouard Martin qui n’a pas utilisé la langue de bois pour répondre aux questions du journaliste du Républicain lorrain.


Articles de Stéphane Mazzucotelli, publiés le 15/09/2017 et le 16/09/2017 dans le quotidien Le Républicain Lorrain

Articles « Séverine Breit : L’Etat allemand a enlevé mon fils » et « Édouard Martin : Des milliers de pétitions contre le Jugendamt »

Rouen : quand le couple franco-allemand se déchire autour des enfants

Article de Boris Maslard et Christophe Hubard, paru le 02/07/2017 dans le journal Paris Normandie

Depuis sa séparation avec son conjoint allemand, Karine Bachelier a progressivement perdu tous ses droits sur sa fille. Elle a fondé à Rouen, en 2011, l’association Enfants otages pour aider les parents confrontés à des situations similaires. Malgré des règlements européens, l’Allemagne se réserve le droit de refuser une décision de justice prise par un autre État membre concernant, par exemple, la garde des enfants.

Karine Bachelier

Tous les mardis soir, Karine Bachelier compose le numéro de téléphone de son ex-conjoint pour joindre sa fille restée en Allemagne. En vain. « Depuis 2012, il ne répond plus », raconte cette mère de famille meurtrie.

La Rouennaise de 41 ans, au même titre que des centaines de parents, tente de faire valoir ses droits. Elle est à l’origine de l’association Enfants otages, créée en 2011 à Rouen, avec Alain Joly, un père traversant une situation semblable. Ensemble et avec un relais actif en Italie, ils viennent en aide à des parents en conflit avec leur ex-conjoint allemand pour les questions de garde et de visite. L’association estime que l’Allemagne, via le Jugendamt (en français, « l’administration de la jeunesse »), favorise très souvent le parent allemand.

« L’impression d’avoir servi de mère porteuse »

Une situation surprenante, dans une Union européenne symbole de protection, reposant essentiellement sur les différences de procédures et la difficulté à faire respecter les règlements européens entre les États membres – Bruxelles II bis en l’occurrence, adopté en 2003, censé régler ces questions.

En 1998, Karine Bachelier part six mois outre-Rhin pour un stage d’études. « Pas de bol, je l’ai rencontré au bout d’un mois, à Nuremberg », glisse-t-elle à propos du futur père de ses deux enfants, sur un ton dissimulant une colère contenue. Amélie naît en 2004, suivie de Patrick en 2007. Mais le couple se sépare peu de temps après. « Il est parti du jour au lendemain, en août2008″, pour « vivre avec son ex avec qui il a déjà eu une fille ». Pendant un an, Karine a la garde de ses enfants, le père les voit un week-end sur deux. Jusqu’au 19 octobre 2009. « Il ne les a pas amenés à l’école après une garde. » La procédure judiciaire est enclenchée pour récupérer ses enfants. Mais face au père réclamant également la garde, l’équivalent outre-Rhin du juge aux affaires familiales ordonne la séparation des enfants. Karine récupère Patrick et voit sa fille s’éloigner. Son appel pour obtenir une décision plus favorable n’y changera rien. « Jusqu’en 2011 tout est très compliqué. Le père ne respecte pas les jugements, poursuit-elle. Plus ça allait et plus il me l’apportait tard et la reprenait tôt. Petit à petit, il rognait mon droit de visite. » Au fil des mois, elle réalise son impuissance à faire respecter ses droits. « J’ai signalé les problèmes au Jugendamt mais cela n’a rien donné. J’ai tout de suite compris que je n’avais aucune chance. » C’est toutefois une employée du Jugendamt qui lui donnera officieusement un conseil prêt à tout chambouler. « Elle m’a expliqué que mon fils risquait d’être placé. » Désormais au chômage, Karine Bachelier décide de rentrer en France. « J’ai organisé mon déménagement en huit jours, sans prévenir personne », sauf son ex-conjoint. « Il a accepté de me donner son accord par écrit pour que je puisse quitter le pays avec Patrick. Je ne voulais pas être accusée d’enlèvement à mon retour. Dès le début, le père ne s’est intéressé qu’à la fille, assure-t-elle, ajoutant dans un souffle : C’est horrible une mère devant choisir entre ses deux enfants. » Depuis, le père de ses enfants s’est marié avec son ex et a pris le nom allemand de cette dernière (le sien étant d’origine polonaise).

Un à deux appels par mois

Dernier acte en date, « il m’a annoncé en mai son intention de faire une requête pour m’enlever l’autorité parentale. Si on détruit ma filiation avec ma fille, j’aurais l’impression d’avoir servi de mère porteuse car sa nouvelle femme était trop âgée pour avoir un autre enfant et leur première fille a des difficultés. » La dernière fois que Karine Bachelier a vu la sienne, c’était en janvier 2016, à peine le temps d’une journée. Son ancien compagnon tentait (en vain) de lui faire signer une autorisation pour qu’Amélie prenne le nom de sa nouvelle femme. « Elle ne m’a pas parlé. Je l’ai trouvée très fermée. Avant, c’était un rayon de soleil. Aujourd’hui, elle a des problèmes de comportement à l’école. »

Les cas similaires (lire par ailleurs) ne sont pas rares. Au titre de l’association Enfants otages, « nous recevons entre un à deux appels par mois, calcule-t-elle. « Malheureusement, lorsque les gens nous contactent c’est souvent déjà trop tard, ajoute Alain Joly, l’autre cheville ouvrière de l’association. Il faut nous appeler avant de se rendre à toute convocation allemande ou de répondre à tout courrier. » Les multiples procédures à engager (toujours en langue allemande) finissent d’user et de décourager des parents souhaitant préserver leurs enfants. « En Allemagne, il faut faire des procédures pour tout, commente Karine Bachelier. Pour les droits de visite, le lieu de résidence, l’autorité parentale, les affaires scolaires… Ce n’est pas comme en France où l’on fait un « paquet ». »

La difficulté de faire respecter des décisions prises par les deux parents renforce cette impasse. « L’Allemagne respecte en apparence les conventions et les règlements qui imposent de décider toujours en considérant le bien-être de l’enfant mais dans leur conception ce bien-être signifie être élevé en Allemagne », complète Alain Joly. « On est seuls, l’État français ne s’en préoccupe pas », soupire Karine Bachelier, découragée devant son impuissance à se faire entendre par l’Allemagne et par son propre pays…

Contact de l’association : 06 04 19 24 25.

D’autres cas en Normandie et ailleurs

Pour le co-fondateur de l’association Enfants otages, Alain Joly, le calvaire débute en 2009 quand, du jour au lendemain, son amie allemande quitte le domicile avec leur fille d’à peine trois ans. « Le tribunal allemand a estimé que je n’étais pas apte à élever mon enfant du fait de mon handicap », relate le Français, aveugle. Quelques mois plus tard, « un coup de fil anonyme passé au Jugendamt annonce que j’allais peut-être essayer d’enlever ma fille… » Après une année passée à voir sa fille trois heures toutes les trois semaines en Allemagne en présence d’un avocat, aujourd’hui, Alain Joly, désormais Rouennais, est autorisé à l’accueillir dans un appartement qu’il conserve en Bavière mais doit être accompagné d’un tiers pour sortir avec elle… « À 11 ans, elle ne peut toujours pas rester dormir chez moi », déplore-t-il, désarmé. Il continue de la voir deux jours toutes les trois semaines.

Le cas de Fabien Lecoutey est légèrement différent. Lui et sa femme sont Français, originaires de Caen. Partis vivre en 1997 à Vannes, en Bretagne, ils se séparent en 2007. Mais au cours des vacances, la mère enlève leurs deux garçons nés en 2002 et 2006 direction l’Allemagne, où elle refait sa vie. « Au commissariat, on m’a conseillé de monter une équipe pour aller chercher mes enfants car ils ne pouvaient rien faire! », se souvient Fabien Lecoutey. En 2009, il accepte finalement de céder ses droits. « Elle voulait que je signe ou sinon je ne les reverrais pas me disait-elle. » Depuis début 2016, l’aîné, 15 ans, ne veut plus voir son père. « Il ne parle plus ni à moi, ni à ma famille, ni à ses quelques très bons copains qu’il avait en France. Même le juge en Allemagne a mis en garde sur la manipulation du compagnon de mon ex-femme. Je n’aurai jamais imaginé qu’un jour un de mes enfants puisse ne plus me parler. Aujourd’hui, j’accepte toutes les situations d’échec pour réussir à conserver mon deuxième. »

Le Jugendamt intervient également lors de déménagement hors d’Allemagne. En 2007, un couple franco-allemand vivant près du Rhin projette de partir vivre à Strasbourg. Leurs deux filles sont récupérées à la sortie de l’école et placées dans une famille allemande par le Jugendamt. Ils profiteront d’un droit de visite pour prendre la fuite et franchir la frontière… France 3 leur avait consacré un reportage :

« Des auditions dès l’âge de 3 ans »

Eleonora Evi, eurodéputée italienne (Mouvement 5 étoiles), a présidé un groupe de travail (de fin 2015 jusqu’au vote du rapport final le 3 mai dernier), au sein de la commission des pétitions du Parlement européen, sur les problèmes de la protection de l’enfance.

Quel est le rôle de la commission des pétitions ?

Eleonora Evi : « Tout citoyen européen peut adresser une pétition. La commission n’a pas de pouvoir législatif mais elle permet de mettre en évidence certaines lacunes du droit européen. »

Pourquoi avoir réclamé un groupe de travail sur cette question des enfants binationaux ?

« C’est le principal problème traité par la commission des pétitions. Depuis 2006, nous avons enregistré près de 250 cas mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg car tous les parents ne connaissent pas la commission. Il existe également d’autres pétitions antérieures mais il nous est difficile de les répertorier. Cela ne concerne pas seulement la France, mais aussi l’Italie, la Pologne, la Suède ou des pays de l’Europe de l’Est. On a maintenant de vrais témoignages et des éléments concrets qui nous disent qu’il existe des discriminations [contestées par les autorités allemandes, lire par ailleurs, NDLR] entre les parents ; en particulier le parent qui n’est pas allemand est pratiquement systématiquement discriminé par le Jugendamt. »

En quoi consiste ce Jugendamt si décrié ?

« C’est une administration qui intervient toujours dans le cas des séparations avec enfant. Il devient une sorte d’avocat pour l’enfant. Il donne des recommandations au juge qui sont presque systématiquement suivies par ce dernier. Et si elles ne le sont pas, le Jugendamt peut faire appel. C’est extrêmement particulier. Cette troisième partie qu’est le Jugendamt veille aux intérêts de l’Allemagne. C’est un peu fort de le dire mais c’est ce que l’on a constaté pendant toutes ces années d’investigation. »

Pour quelles raisons ?

« Ils ont un système qui a toujours considéré que l’État allemand est le meilleur possible pour vivre et pour élever des enfants. C’est aussi fort à dire mais c’est quelque chose qui perdure même si, avec le passé, on aurait dû tirer des leçons de l’Histoire. »

Cela pourrait-il avoir un lien avec la faible démographie allemande ?

« C’est un fait : la natalité est plus basse en Allemagne. On n’a pas de preuves pour le dire mais ce serait logique. »

Vous estimez que l’Allemagne considère que le bien-être de l’enfant passe par une enfance en Allemagne ?

« Oui, vous ne le trouverez jamais écrit mais c’est ce qui se passe. De plus, je ne peux pas l’affirmer officiellement mais on peut penser qu’il y a également une considération économique. Même si le parent non allemand, qui n’a pas la garde, n’a pas les ressources financières pour soutenir l’autre parent, il sera complètement pressé par le Jugendamt et la justice allemande pour donner cet argent [en passant notamment par des huissiers, NDLR]. »

Quelles recommandations avez-vous émises ?

« Nous avons demandé à ce que soient éclairées les notions de bien-être et de l’intérêt supérieur de l’enfant et nous avons fait d’autres recommandations sur un point très important : en Allemagne, les enfants sont écoutés dès l’âge de 3 ans par le juge, les services sociaux ou le Jugendamt. Ces instants ne sont pas enregistrés et les parents n’obtiennent qu’un résumé. Et cela va plus loin. L’Allemagne s’appuie sur le fait que l’enfant (même très jeune) n’a pas été entendu dans l’autre pays pour ne pas respecter la décision précédente de cet autre État membre qui aurait par exemple donné la garde au parent non-allemand. »

Le problème est évoqué depuis des années, notamment lors de questions posées à l’Assemblée nationale en France. Comment expliquez-vous que l’on en soit encore à la rédaction de rapports ?

« La compétence européenne est très limitée sur ces sujets-là. La pression politique permettrait de mettre en lumière ces problèmes mais une partie du Parlement ne veut pas en entendre parler. Des groupes politiques ont affiché une très forte opposition à ce groupe de travail, en particulier des membres du Parti populaire européen où les Allemands sont très représentés. »

Réponse des autorités allemandes

Dans une réponse apportée à la commission des pétitions, le ministère allemand des Affaires familiales, des seniors, des femmes et de la jeunesse atteste du droit de l’Allemagne de ne pas reconnaître une décision prise par un autre État membre. « La Cour constitutionnelle fédérale a statué qu’un tribunal peut demander à entendre un enfant âgé de plus de 3 ans au moment de la décision […] L’audition peut donner une indication de la relation de l’enfant avec un parent, ce qui devrait être pris en compte lors de la prise de décision. Une audience est obligatoire en dehors des cas exceptionnels. Selon ces principes, les décisions prises à l’étranger sans audience ne seront généralement pas reconnues en Allemagne. »

De plus, tiré du rapport final du groupe de travail, ce résumé de l’intervention de M. Hoffman, représentant d’un Jugendamt de Berlin, lors d’une réunion à la commission des pétitions le 10 novembre 2016. Celui-ci dément toute discrimination de parent non-allemand : « M. Hoffmann a souligné qu’il n’y avait pas de discrimination systématique à l’égard d’un groupe de personnes sur la base de la nationalité », souligne le rapporteur. « Cependant, il peut comprendre que la complexité de la procédure allemande, les obstacles linguistiques, les distances, les différentes normes juridiques des pays et les différents concepts éducatifs peuvent conduire à des malentendus et être considérés, à tort, comme des discriminations. Il a ajouté que les différends [entre parents] peuvent durer des années, passer par de nombreuses étapes d’appel et se retrouver au final devant la commission des pétitions. Bien qu’il s’agisse de cas individuels tragiques, de son point de vue, la différence des nationalités n’est pas la clé ici, mais plutôt l’incapacité de trouver un compromis et le refus de coopérer. »

Le Jugendamt, LE parent germanique étatique DE DROIT

D’un côté, un système violent, irrespectueux des droits de l’homme et de l’intérêt supérieur de l’enfant, de l’autre, des états plus soucieux de leurs bonnes relations avec l’Allemagne et l’Autriche que de leurs ressortissants.

Ce mini discours de notre juriste, spécialiste en droit de la famille, a été publié en Italie et s’adresse plus particulièrement aux italiens. Nous l’avons donc, avec son accord, légèrement modifié. Notamment, « italien » a été substitué par « non-allemand ».

Karine, mère porteuse de l’Allemagne malgré elle ?

Le 10 novembre 2016, Karine Bachelier, mère française de deux enfants franco-allemand, expliquait devant la Commission des pétitions du Parlement européen, pourquoi l’Allemagne est sur le point de faire d’elle une mère porteuse.

Pour mieux comprendre comment cela est possible, il faut savoir que le code civil allemand permet, lorsque les parents sont séparés, de substituer le nom de l’enfant commun par le nouveau nom marital du parent qui en a la garde, sous réserve de l’accord de l’autre parent et de l’enfant s’il est âgé d’au moins 5 ans.

Toutefois, ce même article dispose que dans l’hypothèse où le parent non gardien n’est pas d’accord, pour le « bien de l’enfant », le juge peut se substituer à lui pour faire droit à la requête du parent gardien.

Dans l’affaire qui nous intéresse, lorsqu’il s’est marié, l’ex de Karine a abandonné son propre nom pour prendre celui de sa femme actuelle.

Avec la complicité du juge et du Jugendamt allemands, Après avoir déchiré une fratrie et coupé tout contact entre Amélie et sa famille française (sa mère et son frère biologique), le père entend substituer le nom de sa femme actuelle à celui d’Amélie qui est le nom de sa mère.

Ainsi, si le tribunal allemand faisait droit à la demande du père, après avoir en pratique réduit Karine à une mère porteuse malgré elle, il en fera également une mère porteuse administrativement.

Ce que Karine a décrit à la Commission des pétitions est sur le point de se produire. Le représentant du Jugendamt de Berlin l’a clairement expliqué. La décision tiendra compte du « bien-être de l’enfant » et de sa volonté. « Le bien-être » de l’enfant, sempiternel argument qui en réalité signifie vivre en Allemagne, être élevé et éduqué par la communauté allemande, ne parler que l’Allemand …

Quant à la volonté de l’enfant, le témoignage inattendu devant la Commission, de ce jeune homme est éloquent. Il donne une idée très claire de la manière dont se déroulent les auditions des enfants en Allemagne. Auditions qui se font sans aucun moyen de contrôle.

Enfin, ce qui n’est pas négligeable, le représentant du Jugendamt au Parlement européen a récemment révélé que le système allemand assimile l’identité de l’enfant, avec la situation de résidence de l’enfant. Il a affirmé que le juge devra décider si « l’enfant appartient à la nouvelle famille ou s’il peut exprimer son identité avec son origine et son nom [non allemand] ». Apparemment le problème réside dans le fait que le Jugendamt et le tribunal allemand donne une interprétation très « spéciale » et très « allemande » du concept de l’identité.

Karine avait lancé une pétition que vous pouvez trouver ici.

Une méthode de travail du Jugendamt

La réunion de la Commission des pétitions, qui s’est tenue à Bruxelles le 10 novembre 2016, s’est terminée par le témoignage inattendue d’un jeune homme polonais. Il raconte de quelle manière le Jugendamt a su, avec beaucoup de patience, d’humanité, de psychologie, bref, avec le professionnalisme qu’on lui connaît, déterminer où se trouvait l’intérêt de l’enfant qu’il a été à l’époque où sa mère polonaise et son père allemand se séparait.

Appuyer l’audition de Mme Colombo au sein du groupe de travail sur le jugendamt

Chers parents,

Le 29 septembre 2016 à Bruxelles, se réunira le groupe de travail sur le Jugendamt pour lequel nous nous sommes battus.

Malheureusement, encore une fois, on essaie d’exclure de ce groupe, la seule personne aujourd’hui capable d’expliquer le système allemand et les techniques juridiques employées pour détourner les règlements européens et internationaux afin d’écarter les parents non allemands lors de séparations.

C’est pourquoi nous comptons sur vous pour envoyer la lettre dont vous trouverez le modèle plus bas aux eurodéputés dont vous trouverez également la liste plus bas.

D’avance merci pour votre mobilisation.


Modèle de lettre en français :

Mesdames et Messieurs les députés,

Je m’adresse à vous en qualité de citoyen et d’électeur européen.

Depuis des décennies, de trop nombreux parents ont dû se battre contre un système familial placé sous le contrôle du JUGENDAMT (prononcez:’You-Gaine-Tammte’) en Allemagne. Confronté à cette entité de l’ombre omnipotente, un parent n’a absolument aucun espoir d’obtenir justice et équité. Ceux qui ont tenté de s’y opposer avec détermination, comme M. Olivier Karrer ou Mme Marinella Colombo, sont lourdement persécutés. Ils ont été condamnés et emprisonnés, ceci afin de les réduire au silence.

Nonobstant, le problème demeure. Ce que montrent les centaines de pétitions (recevables) sur le sujet, en attente de traitement.

La Commission des Pétitions du Parlement européen (PETI) a décidé de créer un groupe de travail, avec pour mission de rencontrer des experts. Il s’agit de comprendre à fond le système et ses réels enjeux.

Or, il s’avère que les quelques experts en la matière, sont précisément ceux qui ont été poursuivis par les autorités allemandes. Car leur savoir est la raison profonde des poursuites dont ils ont fait l’objet.

Le groupe de travail cité avait choisi d’entendre Mme la Dr. Marinella Colombo en qualité d’expert.

Il semblerait qu’il refuse aujourd’hui de l’inviter.

Dans ces conditions, comment pouvez-vous, vous représentant parlementaire non-allemand, comprendre et nous aider à résoudre le problème que pose le système JUGENDAMT à l’Europe, si ceux qui l’ont décrypté, sont de nouveau interdit de parole ?

C’est la raison pour laquelle je m’adresse à vous.

JE VOUS PRIE DE BIEN VOULOIR APPUYER L’AUDITION DE MME COLOMBO AU SEIN DE CE GROUPE DE TRAVAIL DE LA COMMISSION DES PÉTITIONS.

Je vous remercie.

Dans l’attente de votre confirmation, veuillez agréer l’expression de mes salutations distinguées.

Ville et pays
Date
Prénom et nom


Liste des députés français :

  • sylvie.goddyn@europarl.europa.eu
  • edouard.martin@europarl.europa.eu

Model of letter in English :

Dear Deputies,

Please allow us to address ourselves to you, as European citizens and voters.

Too many parents have been struggling for decades against the German family system which is under the control of the Jugendamt. Each parent has to face on his own this giant and powerful system and usually he or she is bound to give in. Those parents who have stood up and opposed this system, like Olivier Karrer and Marinella Colombo, have been persecuted and condemned to imprisonment with political proceedings, with the aim to put them to silence.

However the problem still exists. Hundreds of admissible petitions denouncing this problem still have to be discussed.

At last, the Committee on Petitions of the European Parliament have decided to create a Working Group on this issue. This group will have to meet the experts in order to fully understand the system which has been denounced by the petitions.

The real experts are the persons who have been persecuted (their expertise is the very reason of the persecution): Dr Olivier Karrer, (who is unable to be present for health reasons) and Dr Marinella Colombo.

She has received the invitation, but PPE (populars) and ALDE (liberals) MEPs have vetoed her presence, probably in response to German instructions.

How can you understand and solve this problem if the people who can explain every detail and purpose will be put to silence and not heard ?

WE PUBLICLY URGE YOU TO CONFIRM THE INVITATION SENT TO MARINELLA COLOMBO TO THE HEARING AT THE WORKING GROUP OF THE COMMITTEE ON PETITIONS.

If not, we will know who is working against the interests of parents and citizens and, in the future, we will take our decisions accordingly.

We appeal to your understanding.

Kind regards,

City and Country
Date
Firstname and name


List of MEPs from other countries :

  • marco.affronte@europarl.europa.eu
  • laura.agea@europarl.europa.eu
  • marina.albiol@europarl.europa.eu
  • margrete.auken@europarl.europa.eu
  • beatriz.becerra@europarl.europa.eu
  • mara.bizzotto@europarl.europa.eu
  • soledad.cabezonruiz@europarl.europa.eu
  • enrique.calvetchambon@europarl.europa.eu
  • alberto.cirio@europarl.europa.eu
  • andrea.cozzolino@europarl.europa.eu
  • pal.csaky@europarl.europa.eu
  • miriam.dalli@europarl.europa.eu
  • rosa.estaras@europarl.europa.eu
  • eleonora.evi@europarl.europa.eu
  • elisabetta.gardini@europarl.europa.eu
  • michela.giuffrida@europarl.europa.eu
  • takis.hadjigeorgiou@europarl.europa.eu
  • daniel.hannan@europarl.europa.eu
  • marian.harkin@europarl.europa.eu
  • anja.hazekamp@europarl.europa.eu
  • gyorgy.holvenyi@europarl.europa.eu
  • carlos.iturgaiz@europarl.europa.eu
  • rikke.karlsson@europarl.europa.eu
  • jude.kirton-darling@europarl.europa.eu
  • urszula.krupa@europarl.europa.eu
  • kostadinka.kuneva@europarl.europa.eu
  • miltiadis.kyrkos@europarl.europa.eu
  • svetoslav.malinov@europarl.europa.eu
  • notis.marias@europarl.europa.eu
  • roberta.metsola@europarl.europa.eu
  • marlene.mizzi@europarl.europa.eu
  • jozsef.nagy@europarl.europa.eu
  • javier.nart@europarl.europa.eu
  • victor.negrescu@europarl.europa.eu
  • victor.negrescu-office@europarl.europa.eu
  • demetris.papadakis@europarl.europa.eu
  • julia.pitera@europarl.europa.eu
  • laurentiu.rebega@europarl.europa.eu
  • julia.reda@europarl.europa.eu
  • michele.rivasi@europarl.europa.eu
  • sofia.sakorafa@europarl.europa.eu
  • sven.schulze@europarl.europa.eu
  • josep-maria.terricabras@europarl.europa.eu
  • eleni.theocharous@europarl.europa.eu
  • laszlo.tokes@europarl.europa.eu
  • yana.toom@europarl.europa.eu
  • elena.valenciano@europarl.europa.eu
  • bodil.valero@europarl.europa.eu
  • angela.vallina@europarl.europa.eu
  • jaroslaw.walesa@europarl.europa.eu
  • cecilia.wikstrom@europarl.europa.eu
  • boris.zala@europarl.europa.eu
  • sotirios.zarianopoulos@europarl.europa.eu
  • tatjana.zdanoka@europarl.europa.eu
  • manfred.weber@europarl.europa.eu
  • gianni.pittella@europarl.europa.eu
  • syed.kamall@europarl.europa.eu
  • guy.verhofstadt@europarl.europa.eu
  • rebecca.harms@europarl.europa.eu
  • philippe.lamberts@europarl.europa.eu
  • david.borrelli@europarl.europa.eu
  • nigel.farage@europarl.europa.eu

Le cauchemar de Valérie

Dans notre article du 21 février 2016 « On leur a volé leurs enfants, seront-ils aussi ruinés ?« , nous expliquions, sur la base de l’histoire de l’une de nos membres, comment l’Allemagne et son système parvenait à légaliser les enlèvements d’enfants.

Si au début, on pouvait comprendre l’incrédulité du gouvernement, aujourd’hui, nous ne comprenons pas la passivité de la France et de l’Union européenne toute entière.

Cela dit, à la demande de Valérie, nous publions son témoignage, afin de vous permettre de suivre l’évolution de sa situation.

Il faudra bien du courage à Valérie et à sa petite famille qu’elle a su patiemment reconstruire, pour résister à un système qui non seulement vole des enfants, mais encore détruit la vie de leurs parents.

C’est en 1997, alors qu’elle est encore étudiante que Valérie rencontre son futur mari. Il est de nationalité allemande. Ils se marient l’année suivante et Valérie attend rapidement leur premier enfant.

Zoé naît en 1999. Cette année, Valérie obtient sa licence en Sciences Sociales et Ergonomie du Travail.

Son époux souhaite qu’elle puisse élever ses enfants, tout comme l’a fait sa mère, une tradition forte dans la famille allemande. Valérie accepte et met entre parenthèses ses études.

Ils sont installés en France à deux pas de la frontière, étant donné que Monsieur travaille en Allemagne.

Deux ans plus tard, Valérie donne naissance à Léo alors que le couple bat déjà de l’aile. Son mari, très dominant, refuse qu’elle travaille et lui donne juste de quoi couvrir les frais de la famille en France. Le reste est sur son compte personnel, dans une banque allemande.

En avril 2002, Zoé est âgée de deux ans et demi et Léo a six mois. Valérie décide de se séparer et de demander le divorce. Son mari quitte immédiatement l’appartement en France et va s’installer chez ses parents, en Allemagne. Il voit les enfants quand il le souhaite et les confie volontiers à la grand-mère paternelle. En revanche, il refuse de donner à Valérie la pension alimentaire fixée d’un commun accord. Toutefois, c’est lui qui touche les allocations familiales en Allemagne.

Valérie, quant à elle, cherche un emploi. Hélas, sans expérience et avec 2 enfants à charge, elle ne trouve rien. Rapidement, ses économies partent dans les dépenses du quotidien. Néanmoins, la grand-mère allemande accepte toujours de garder Zoé et Léo pendant que Valérie se rend à des entretiens d’embauche.

Un jour, le papa des enfants lui propose de prendre la garde, étant donné qu’elle peine à trouver du travail et que de toutes façons c’est la grand-mère paternelle qui garde les enfants dès que c’est nécessaire. Valérie refuse, mais elle finit rapidement par se trouver acculée, toujours sans emploi et sans ressources. Elle se voit obligée d’accepter la proposition. Rapidement, les papiers sont modifiés et le droit de garde des enfants est transféré au papa. Il est convenu que Valérie ne paiera pas de pension alimentaire.

Quelques temps passent sans trop d’accrocs, même si Son ex-mari reste très présent, jusqu’à lui rendre des visites à l’improviste et lui faire promettre que si elle devait rencontrer quelqu’un, elle lui présenterait pour avoir son aval. Valérie trouve enfin un emploi.

Hélas, la situation s’envenime, Valérie ne supporte plus les visites intempestives et autres contrôles. Sans cesses, son ex-belle-mère lui fait des reproches, lui explique que Zoé fait des cauchemars quand elle revient de chez sa mère, qu’elle vit mal le fait de devoir lui rendre visite.

Pour le 5ème anniversaire de Zoé (le 14 septembre 2004), Valérie émet le souhait de le fêter chez elle. Mais ça ne se passe pas comme prévu : toute la famille allemande débarque en force avec les enfants. Valérie est reléguée comme simple hôtesse, ses enfants sont distants et accaparés par les grands-parents, oncles, tantes, cousins, cousines… Valérie sent que la situation lui échappe. Elle se rend compte que sa fille parle de moins en moins le français, qu’elle devient distante. Léo, lui, n’a jamais appris le français.

A partir de cette date, elle ne parvient plus à appeler ses enfants, qui ne sont jamais disponibles. Certes, Valérie occupe un poste de réceptionniste et travaille souvent le weekend, néanmoins, elle fait son maximum pour être disponible ne serait-ce que du samedi après-midi au lundi matin. Mais à chaque fois qu’elle souhaite prendre les enfants pour le week-end, le père ou la grand-mère trouvent des excuses.

Valérie décide de se rendre chez ses ex-beaux-parents pour chercher les enfants. Après avoir longuement sonné à la porte et appelé, sa belle-mère daigne entrouvrir la porte et lui explique que son fils a décidé qu’elle ne verrait plus les enfants. Valérie hurle, pleure, mais la grand-mère reste de marbre.

Valérie se rend au commissariat le plus proche pour leur expliquer la situation. Les gendarmes lui explique qu’ils ne peuvent rien pour elle. Elle rentre chez elle, cherche tous les documents en sa possession au sujet de la garde de Zoé et Léo et des droits de visite. Elle prend également le livret de famille, car les enfants n’ont que la nationalité française. Rien n’y fait, les gendarmes campent sur leur position.

De là, Valérie a contacté son avocate. S’agissant d’un divorce à l’amiable, cette dernière lui a expliqué qu’il faudrait reprendre toute la procédure et qu’en-outre Valérie n’avait aucun recours, si ce n’est de demander l’exéquatur du jugement de divorce en Allemagne. Pour cela il faudrait prendre un avocat allemand en sachant que le divorce serait non pas traduit, mais rejugé et qu’elle ne pourrait sans doute pas faire valoir ses droits. Etant donné sa situation financière, le peu de chance de gagner et le fait qu’à cette époque, en 2004, Valérie n’avait connaissance d’aucune association d’aide aux parents binationaux, elle n’a pas pu donner suite.

Régulièrement depuis lors, elle a tenté de reprendre contact avec ses enfants par différents biais, y compris les réseaux sociaux. Hélas, sans succès. Aujourd’hui, Zoé et Léo âgés respectivement de 16 et 14 ans refusent tout contact avec leur mère.

En Mai 2015, bien que toujours sans nouvelles de ses enfants et déchue par l’Allemagne de ses droits parentaux, Valérie reçoit un courrier de l’avocat de son ex-mari pour une demande de pension alimentaire. En décembre 2015, Valérie est condamnée par défaut par le tribunal allemand à verser 710€ par mois de pensions alimentaires.

Le jugement est non conforme et n’est pas exécutoire en l’état. Néanmoins, grâce à la législation européenne qui permet de faciliter l’exécution d’un jugement d’un pays à l’autre, le dossier est entre les mains d’un huissier français. En effet, un document (Annexe I du Bruxelles II Bis) complété par le greffe du tribunal allemand permet de faire exécuter tout jugement, même s’il n’est pas conforme aux lois.

Le bien-être de l’enfant, une brèche dans la législation européenne

Article de Eurojournalist Strasbourg, publié le 01/07/2016 sur le site eurojournalist.eu

Comment expliquer de nos jours qu’en Europe, avec tous les règlements, les traités et les conventions, bref, tout ce qui concrétise la volonté des pays de l’Union Européenne de construire une entité commune basée sur la confiance mutuelle, que certains parents se voient déchus de leurs droits et liens parentaux en toute impunité, sans avoir pour autant fait quelque chose de préjudiciable ?

Tant que les familles franco-allemandes sont intactes, tout va bien. Mais en cas de séparation… Foto: Kelovy / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Par Viviane Philippe) – Nous allons tenter de vous expliquer ce qu’il faut savoir sur le droit de la famille allemand pour comprendre comment il est possible que les enfants, lors de séparations, qu’ils aient été enlevés ou non par l’un des parents, restent quasiment toujours en Allemagne. Il ne s’agit pas de s’étendre sur des notions juridiques, mais d’expliquer à tout un chacun, « comment ça marche » !

Mise en situation à partir d’un cas où aucun des parents n’est allemand et aucun enfant n’est né en Allemagne :

Un couple de parents non-allemands déménage pour s’installer en Allemagne où ils y vivent heureux pendant six mois, période à l’issue de laquelle, la résidence de ce couple devient juridiquement l’Allemagne. Dès lors, le juge compétent pour connaître des affaires familiales est le juge allemand qui lorsqu’il sera saisi, en cas de séparation, ne permettra plus jamais que l’enfant quitte le sol allemand. Vous me direz, mais c’est improbable !

Alors développons.

Tout d’abord il faut préciser qu’en Allemagne sévit une institution des plus puissantes. Il s’agit du JUGENDAMT, à ne pas confondre – comme c’est souvent le cas – avec les services sociaux. Ce service administratif régional a un rôle très étendu : ses pouvoirs décisionnels et ses possibilités d’interventions sont innombrables et sa finalité est bien différente de ce que se doit d’être un service social. Le Jugendamt, partie prenante dans toutes les procédures familiales allemandes, veille à ce que les enfants grandissent en Allemagne.

Pour quelle raison ?

Parce que l’Etat allemand estime qu’un enfant, pour vivre bien, doit vivre en Allemagne. Cela implique très souvent qu’il perdra tout contact avec son parent et sa famille non-allemande. En cas de séparation, le Jugendamt devient très invasif et participe d’office à toute procédure impliquant un mineur, non pas en tant que conseiller du juge, mais en tant que partie prenante, au même titre que les parents, même si ceux-ci sont en pleine possession de leurs droits parentaux. En d’autres termes, en Allemagne, les enfants ont trois parents !

Le juge n’a pas le choix. Il est tenu de demander la participation du Jugendamt à la procédure et de lui demander son avis (§ 162 Loi sur les procédures familiales de libre juridiction, FamFG et § 50 du livre VIII du Code social allemand, SGB, Buch VIII).

Cet avis est contraignant pour le juge, puisque le Jugendamt peut interjeter appel de sa décision s’il n’a pas suivi ses recommandations. En effet, la loi reconnaît expressément au Jugendamt le droit de faire appel contre les décisions (Gegen die Beschlüsse steht dem Jugendamt ein eigenes Beschwerderecht zu), lui attribuant ainsi implicitement une fonction de pouvoir et de contrôle sur les juges aux affaires familiales.

Le « Verfahrensbeistand »

Un autre acteur juridique participe également aux procédures familiales allemandes. C’est le « Verfahrensbeistand », dont le nom est souvent mal traduit, soit par « curateur » soit par « avocat de l’enfant », précisément parce que cette entité n’existe pas dans les juridictions qui ne sont pas germaniques. En France, le curateur est nommé et prend part à la procédure dans le cas où les parents ont perdu la garde de l’enfant, alors qu’en Allemagne, il est également nommé lorsque les parents détiennent pleinement leurs droits parentaux. C’est pour cette raison que nous parlons ici d’une mauvaise traduction. L’autre traduction, « l’avocat de l’enfant », est également erronée, parce que si l’enfant, devenu adolescent, souhaite choisir son propre avocat, il n’est pas en droit de le faire.

En réalité, le Verfahrensbeistand est une autre entité étatique nommée par le tribunal, qui fonctionne généralement en accord avec le Jugendamt, en soutenant les mêmes arguments qui dans ce cas seront considérés – à tort – comme une expression de la volonté de l’enfant.

En cas de séparation sous juridiction allemande, la question « À qui revient la garde des enfants ? » est complètement inutile. Tôt ou tard, la garde sera attribuée au parent allemand (ou au parent qui décide de vivre en Allemagne) parce qu’il est celui qui peut le mieux garantir le « bien-être de l’enfant », bien-être qui correspond, comme on l’a vu, au fait de grandir en Allemagne, parler allemand, fréquenter une école allemande, penser en bon allemand. Tout cela a été récemment répété et même écrit lors d’une réunion des représentants des Länder à Berlin.

Dans ces conditions, la procédure devant le juge ne sert qu’à construire les arguments qui donnent à la décision déjà prise, une apparence légale, conforme aux droits fondamentaux et à tous les textes ratifiés par l’Allemagne, pour donner la garde au parent allemand ou résidant en Allemagne. Il va sans dire que pour le parent lésé, cela a tout d’une mascarade.

Pour les mêmes raisons, lorsqu’un des parents vit à l’étranger, il est très simple pour le parent allemand de supprimer dans les faits tout droit de visite de l’autre parent. Même en présence d’une décision qui prévoit un droit de visite à l’étranger (ce qui est rare), si le parent allemand ne la respecte pas, il n’y a aucun moyen de le forcer à le faire. En effet, garder des contacts avec une réalité non allemande ne correspond pas au bien-être de l’enfant.

A titre d’exemple, voici quelques cas réels qui tiennent de l’absurde. En Allemagne, pour le bien de l’enfant, il peut être décidé de modifier son état-civil, par exemple en germanisant son/ses prénoms ou, pire, en changeant son nom de famille. Mieux encore, en Allemagne, il peut être décidé qu’un enfant, toujours pour son bien-être ait à porter le patronyme du nouvel époux ou de la nouvelle épouse de son parent allemand.

On a pu lire récemment que « les enfants payent le prix fort lorsque les états membres ne réussissent pas à coopérer et protéger leurs intérêts dans des procédures légales comme des conflits transfrontaliers pour la garde parentale ». C’est en ces termes que les députés européens ont voté fins avril 2016 une résolution non contraignante. Belle initiative et tout à fait inutile ! De fait même si à priori l’Allemagne respecte les conventions et les règlements, sa conception du bien-être de l’enfant est complètement différente de celles des autres pays européens. Dans ce cas toute coopération ou procédure légale vivement conseillée ne sera pas pour autant appliquée, dans la mesure où il peut être considéré comme bénéfique pour l’enfant de perdre sa mère ou son père si il ou elle n’est pas allemand(e) ou si cela garantit qu’il vivra en Allemagne.

Il est à rappeler que dès 1995 ces questions ont été posées aussi bien à l’Assemblée Nationale qu’au Sénat.

Hélas, à ce jour, que ce soit pour les enfants ou les parents, aucune solution, restriction ou loi n’a pu être votée et imposée à l’Allemagne. Depuis plus de 20 ans ces injustices qui détruisent des familles perdurent et sont consciemment ignorées par nos autorités. En effet, selon le Quai d’Orsay, seule une petite quinzaine de cas semblent exister, bien qu’en 2015, Pierre-Yves Le Borgn’, Député des français de l’étranger, estimait avoir connaissance de centaines de cas. Alors quelles solutions pour ces drames humains qui se produisent sous nos yeux, en Europe ? Quels seront les politiques qui voudront enfin s’investir pour cette cause perdue ?