Le cauchemar de Valérie

Dans notre article du 21 février 2016 « On leur a volé leurs enfants, seront-ils aussi ruinés ?« , nous expliquions, sur la base de l’histoire de l’une de nos membres, comment l’Allemagne et son système parvenait à légaliser les enlèvements d’enfants.

Si au début, on pouvait comprendre l’incrédulité du gouvernement, aujourd’hui, nous ne comprenons pas la passivité de la France et de l’Union européenne toute entière.

Cela dit, à la demande de Valérie, nous publions son témoignage, afin de vous permettre de suivre l’évolution de sa situation.

Il faudra bien du courage à Valérie et à sa petite famille qu’elle a su patiemment reconstruire, pour résister à un système qui non seulement vole des enfants, mais encore détruit la vie de leurs parents.

C’est en 1997, alors qu’elle est encore étudiante que Valérie rencontre son futur mari. Il est de nationalité allemande. Ils se marient l’année suivante et Valérie attend rapidement leur premier enfant.

Zoé naît en 1999. Cette année, Valérie obtient sa licence en Sciences Sociales et Ergonomie du Travail.

Son époux souhaite qu’elle puisse élever ses enfants, tout comme l’a fait sa mère, une tradition forte dans la famille allemande. Valérie accepte et met entre parenthèses ses études.

Ils sont installés en France à deux pas de la frontière, étant donné que Monsieur travaille en Allemagne.

Deux ans plus tard, Valérie donne naissance à Léo alors que le couple bat déjà de l’aile. Son mari, très dominant, refuse qu’elle travaille et lui donne juste de quoi couvrir les frais de la famille en France. Le reste est sur son compte personnel, dans une banque allemande.

En avril 2002, Zoé est âgée de deux ans et demi et Léo a six mois. Valérie décide de se séparer et de demander le divorce. Son mari quitte immédiatement l’appartement en France et va s’installer chez ses parents, en Allemagne. Il voit les enfants quand il le souhaite et les confie volontiers à la grand-mère paternelle. En revanche, il refuse de donner à Valérie la pension alimentaire fixée d’un commun accord. Toutefois, c’est lui qui touche les allocations familiales en Allemagne.

Valérie, quant à elle, cherche un emploi. Hélas, sans expérience et avec 2 enfants à charge, elle ne trouve rien. Rapidement, ses économies partent dans les dépenses du quotidien. Néanmoins, la grand-mère allemande accepte toujours de garder Zoé et Léo pendant que Valérie se rend à des entretiens d’embauche.

Un jour, le papa des enfants lui propose de prendre la garde, étant donné qu’elle peine à trouver du travail et que de toutes façons c’est la grand-mère paternelle qui garde les enfants dès que c’est nécessaire. Valérie refuse, mais elle finit rapidement par se trouver acculée, toujours sans emploi et sans ressources. Elle se voit obligée d’accepter la proposition. Rapidement, les papiers sont modifiés et le droit de garde des enfants est transféré au papa. Il est convenu que Valérie ne paiera pas de pension alimentaire.

Quelques temps passent sans trop d’accrocs, même si Son ex-mari reste très présent, jusqu’à lui rendre des visites à l’improviste et lui faire promettre que si elle devait rencontrer quelqu’un, elle lui présenterait pour avoir son aval. Valérie trouve enfin un emploi.

Hélas, la situation s’envenime, Valérie ne supporte plus les visites intempestives et autres contrôles. Sans cesses, son ex-belle-mère lui fait des reproches, lui explique que Zoé fait des cauchemars quand elle revient de chez sa mère, qu’elle vit mal le fait de devoir lui rendre visite.

Pour le 5ème anniversaire de Zoé (le 14 septembre 2004), Valérie émet le souhait de le fêter chez elle. Mais ça ne se passe pas comme prévu : toute la famille allemande débarque en force avec les enfants. Valérie est reléguée comme simple hôtesse, ses enfants sont distants et accaparés par les grands-parents, oncles, tantes, cousins, cousines… Valérie sent que la situation lui échappe. Elle se rend compte que sa fille parle de moins en moins le français, qu’elle devient distante. Léo, lui, n’a jamais appris le français.

A partir de cette date, elle ne parvient plus à appeler ses enfants, qui ne sont jamais disponibles. Certes, Valérie occupe un poste de réceptionniste et travaille souvent le weekend, néanmoins, elle fait son maximum pour être disponible ne serait-ce que du samedi après-midi au lundi matin. Mais à chaque fois qu’elle souhaite prendre les enfants pour le week-end, le père ou la grand-mère trouvent des excuses.

Valérie décide de se rendre chez ses ex-beaux-parents pour chercher les enfants. Après avoir longuement sonné à la porte et appelé, sa belle-mère daigne entrouvrir la porte et lui explique que son fils a décidé qu’elle ne verrait plus les enfants. Valérie hurle, pleure, mais la grand-mère reste de marbre.

Valérie se rend au commissariat le plus proche pour leur expliquer la situation. Les gendarmes lui explique qu’ils ne peuvent rien pour elle. Elle rentre chez elle, cherche tous les documents en sa possession au sujet de la garde de Zoé et Léo et des droits de visite. Elle prend également le livret de famille, car les enfants n’ont que la nationalité française. Rien n’y fait, les gendarmes campent sur leur position.

De là, Valérie a contacté son avocate. S’agissant d’un divorce à l’amiable, cette dernière lui a expliqué qu’il faudrait reprendre toute la procédure et qu’en-outre Valérie n’avait aucun recours, si ce n’est de demander l’exéquatur du jugement de divorce en Allemagne. Pour cela il faudrait prendre un avocat allemand en sachant que le divorce serait non pas traduit, mais rejugé et qu’elle ne pourrait sans doute pas faire valoir ses droits. Etant donné sa situation financière, le peu de chance de gagner et le fait qu’à cette époque, en 2004, Valérie n’avait connaissance d’aucune association d’aide aux parents binationaux, elle n’a pas pu donner suite.

Régulièrement depuis lors, elle a tenté de reprendre contact avec ses enfants par différents biais, y compris les réseaux sociaux. Hélas, sans succès. Aujourd’hui, Zoé et Léo âgés respectivement de 16 et 14 ans refusent tout contact avec leur mère.

En Mai 2015, bien que toujours sans nouvelles de ses enfants et déchue par l’Allemagne de ses droits parentaux, Valérie reçoit un courrier de l’avocat de son ex-mari pour une demande de pension alimentaire. En décembre 2015, Valérie est condamnée par défaut par le tribunal allemand à verser 710€ par mois de pensions alimentaires.

Le jugement est non conforme et n’est pas exécutoire en l’état. Néanmoins, grâce à la législation européenne qui permet de faciliter l’exécution d’un jugement d’un pays à l’autre, le dossier est entre les mains d’un huissier français. En effet, un document (Annexe I du Bruxelles II Bis) complété par le greffe du tribunal allemand permet de faire exécuter tout jugement, même s’il n’est pas conforme aux lois.