Encore un enfant sacrifié sur l’autel de l’amitié franco-allemande

Le 19 mars 2015, Armen Soukiassyan devra affronté, seul, la « justice » allemande. Comme tous les parents non allemands, il se fera probablement humilier pour finalement s’entendre dire que sa fille Isabelle deux fois enlevée par sa mère, doit pourtant pour son bien, rester en Allemagne.

Encore une fois, l’Allemagne a exploité les failles (le bien de l’enfant et la confiance mutuelle entre les pays membres) de la Convention de La Haye et du Règlement européen dit « Bruxelles II bis, pour en détourner la finalité : le retour immédiat de l’enfant enlevé dans son pays de résidence.

Encore une fois la « justice » allemande a refusé de reconnaître la décision d’un tribunal non allemand.

Encore une fois, un ressortissant français est abandonné par les autorités françaises au nom de l’amitié franco-allemande.

Encore une fois, un enfant a été sacrifié au nom de cette sacrosainte amitié.

Drôle d’amitié en vérité que cette amitié où l’un des amis se permet tout et l’autre ne dit rien pour ne pas heurter sa susceptibilité.

Lorsqu’il s’est agi de protéger un ressortissant allemand, le Dr Krumbach, violeur et assassin de la fille d’André Bamberski, les hauts responsables allemands se sont-ils inquiétés de ne pas heurter la susceptibilité de notre justice lorsqu’ils ont envoyé leur ambassadeur tenter d’influencer le président de la Cour ? Helmut Schmidt a-t-il eu mauvaise conscience lorsqu’il a appelé François Mitterand pour « un échange de service » ?


Article de Jérôme Rivet, paru le 12/03/2015 dans La Dépêche

Retenue en Allemagne : il faut un miracle à Armen pour rapatrier sa fille de 8 ans, Isabelle

Jeudi prochain, un juge allemand du tribunal de Hamm se prononcera sur le rapatriement ou non de la petite Isabelle Soukiassyan à Albi chez son père Armen à qui la justice française a accordé l’autorité parentale unique et fixé la résidence chez son papa depuis le 28 décembre 2013.

Armen Soukiassyan se bat avec acharnement depuis près de quinze mois pour revoir son enfant. Ce père de famille saura cet après-midi s’il est autorisé à voir sa fille sous conditions ce week-end et la semaine prochaine dans les environs de Hamm.

« Une personne du service d’aide social à l’enfance allemand, le Jugendamt, a proposé qu’ils puissent éventuellement se voir mais sous surveillance, précise Jocelyne Courtois, une amie d’Armen qui l’assiste dans toutes ses démarches. Par ailleurs, elle a indiqué qu’il y avait un risque de traumatisme pour la fillette car elle n’a pas vu son père depuis longtemps. Ce serait risible si ce n’était vrai. »

En attendant ces possibles retrouvailles éphémères, Armen se contente de dialoguer depuis des mois avec Isabelle via Skype à raison de deux fois quinze minutes par semaine les mardis et jeudis. « Ce sont de maigres instants de bonheur dont il est obligé de se contenter alors qu’il a l’autorité parentale unique, décrit Jocelyne Courtois. La petite fait des dessins à son père. Elle voudrait le voir. En revanche, petit à petit, elle ne parle plus à son père en français ni en arménien mais en allemand. »

Jeudi prochain, défendu par un avocat allemand commis d’office qui leur coûte un bras à chaque audience et assisté par un interprète qui ne maîtrise pas le dossier, ce père albigeois se rendra dans l’arène, comme beaucoup d’autres pères et mères français et étrangers avant lui, pour faire valoir ces droits d’autorité parentale unique sur sa fille de huit ans reconnus par la justice de son pays mais piétinés par celle du voisin germanique.

« La semaine prochaine, il espère toujours le retour d’Isabelle et ce sans contrepartie car il en a la garde, confie Jocelyne Courtois. Isabelle a quand même fait l’objet d’un enlèvement par sa mère condamné par la justice française. »

La chance serait la présence du consul de France qui. ne sera pas là.

Dans leur parcours du combattant, les Soukiassyan ont reçu le soutien de Marinella Colombo, journaliste italienne au Parlement européen, qui a subi le même calvaire. « Je n’ai pas revu mes deux enfants âgés de 12 et 16 ans depuis quatre ans. Ils sont retenus en Allemagne par mon ex-mari. Ce pays détourne les règlements européens de façon apparemment légale. Il faut savoir que depuis la chute du mur de Berlin en 1989, pas un seul enfant étranger kidnappé par le conjoint allemand n’a été renvoyé à l’étranger. Le code de procédure allemand permet à une décision de ne jamais devenir exécutoire pas même par la force. En clair, si la justice ordonne un rapatriement. La police va à l’adresse de l’enfant une ou deux fois. Et puis plus rien. Pour le cas d’Isabelle, ça va être dur. Ils ont gagné du temps pour faciliter son intégration et refuser tout retour à son pays d’origine sous ce prétexte. La seule chance pour aider Armen serait la présence du consul de France. L’Allemagne rend ce kidnapping légal et c’est toujours comme ça. »

Réponse de l’État français à un de ses ressortissants en détresse. « Il n’apparaît pas judicieux d’assurer une présence consulaire aux côtés de M. Soukiassyan au tribunal. Une telle présence risquerait d’être contre-productive car mal vécue par la justice allemande (d’une part c’est un État de droit européen ; d’autre part nous ne participons jamais aux audiences en matière de droit de la famille en Allemagne). » (note de l’Association : plus bas notre intervention auprès du Consulat)

En clair et pour résumer cette prose diplomatique : « ne comptez pas sur nous ». Il faudra désormais un petit miracle pour qu’Armen Soukiassyan puisse repartir du tribunal allemand avec sa fille.


Dates clés d’un incroyable imbroglio juridique

2 novembre 2006 : naissance d’Isabelle Soukiassyan.

2010 : Isabelle disparaît avec sa mère durant huit mois. Son père la retrouve à Nantes et la ramène à Albi.

7 février 2012 : divorce entre Armen Soukiassyan et Liana Lalayan prononcé.

16 juillet 2012 : Liana Lalayan et sa fille Isabelle quittent le territoire français.

26 octobre 2012 : Plainte pour non-représentation d’enfant auprès du Procureur de la République d’Albi par Armen Soukiassyan.

13 novembre 2012 : demande de retour sur fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 au Bureau d’Entraide civile internationale du Ministère de la Justice.

3 mai 2013 : Armen Soukiassyan demande au juge des affaires familiales (JAF) d’Albi l’exercice de l’autorité parentale exclusive.

12 juillet 2013 : devant le tribunal de Hamm (Allemagne), les parents conviennent qu’il s’agit d’un enlèvement d’enfant, de se soumettre à la décision du juge français seul compétent et que la résidence de l’enfant se situe dès à présent et jusqu’à nouvel ordre encore en France.

28 novembre 2013 : Le JAF d’Albi confie l’exercice exclusif de l’autorité parental a u père et fixe la résidence habituelle de la petite Isabelle chez son père à compter du 28 décembre 2013.

19 mars 2014 : la cour d’Appel de Toulouse déboute Mme Lalayan de sa demande d’appel de la décision du JAF en date du 28 novembre 2013.

17 décembre 2014 : Un juge allemand du tribunal de Hamm ordonne le « maintien en Allemagne » de la petite fille jugée « bien intégrée » dans son pays d’accueil.


En soutien à Monsieur Soukiassyan, nous avons écrit au consulat.

Notre courriel a fait écho à celui que le consulat avait adressé à Monsieur Soukiassyan et dont seule la dernière partie plus haut surlignée, a été citée par La Dépêche.

Le document du tribunal allemand publié dans cet article n’est pas l’un des documents que nous avons attaché à notre courriel.

Monsieur,

Monsieur Soukiassyan nous a communiqué votre courriel daté du 11 mars 2015 que vous lui avez adressé, en réponse à sa demande de soutien et nous sommes surpris par la motivation de votre refus d’assister à l’audience du 19 mars 2015.

En effet, vous avez précisé que Monsieur Soukiassyan avait souhaité être accompagné d’un agent consulaire à la prochaine audience du Tribunal de Hamm « qui doit statuer sur le droit de garde de sa fille Isabelle Soukiassyan ».

Nous nous permettons donc d’intervenir pour vous rappeler qu’il ne s’agira pas, lors de l’audience du 19 mars 2015, de statuer sur le droit de garde de sa fille, ce qui serait pour le moins incompréhensible, puisque Monsieur Soukiassyan détient déjà sur elle, le droit de garde et même l’autorité parentale exclusive.

En revanche, il s’agira (cf. pièce jointe n°1), de statuer sur le retour d’Isabelle Soukiassyan en France, auprès de son vrai père et de sa vraie famille où elle vivait avant que sa mère l’en arrache, ce qu’avait reconnu le tribunal allemand en juillet 2013.

Dans cette procédure il s’agira donc uniquement de l’application de la convention internationale relative aux enlèvements.

Enfin, étant donné que l’autorité centrale, service du ministère de la justice allemand, est également partie prenante (cf. pièce jointe n°1 et § 3 ff. IntFamRVG), nous insistons sur l’importance de votre présence à cette audience.

En espérant avoir dissipé ce malentendu, ce qui vous permettra peut-être de reconsidérer votre décision, nous vous prions, Monsieur, d’agréer l’expression de notre considération distinguée.

Les parents membres de l’association « Enfants Otages ».