Droit à un procès équitable en Allemagne : une Française en risque de perdre son fils mardi

A cette heure, nous tentons toujours d’obtenir une présence consulaire à l’audience du mardi 14 avril 2020, comme il a été recommandé par la résolution du parlement européen de novembre 2018.


Article de Pénélope Bacle, publié le 12/04/2020 sur le site francaisaletranger.fr

Malgré le weekend de Pâques et le confinement, un juge allemand a refusé de reporter l’audience mardi matin concernant la garde d’un enfant franco-allemand. Sa mère française, informée cinq jours plus tôt de cette audience par un email du père de l’enfant, à qui aucun document n’a été transmis pour préparer sa défense, craint de perdre son fils face à un système réputé discriminant.

La nouvelle a été confirmée le 9 avril à 15h31 par le tribunal allemand . Une Française, dont nous avons choisi de conserver l’identité secrète par mesure de précaution, devra se rendre le 14 avril devant le juge allemand des affaires familiales, accompagnée de son fils de deux ans. Le tribunal fermant à 15h30 ce soir là et jusqu’à mardi matin pour le weekend de Pâques, aucune chance de recours pour cette jeune mère qui craint que le juge allemand ne saisisse cette occasion pour lui retirer la garde de son fils. Depuis des années, de nombreux parents ont rapporté avoir ainsi perdu la garde de leur enfant né d’une union franco-allemande, les juges allemands donnant souvent gain de cause au parent allemand, selon l’Association Enfants Otages qui réunit des parents privés de leurs enfants par le système allemand suite à une séparation.

> Des jeunes enfants auditionnés

Le cour allemande a exigé que cette Française soit accompagnée à cette audience de son fils âgé de deux ans. L’enfant, qui doit être muni de son passeport, sera vraisemblablement auditionné à cette occasion. Le Parlement européen avait lui-même pointé du doigt ces « auditions secrètes » et voté, fin 2018, une résolution encadrant ce type d’actions du Jugendamt, l’administration de la jeunesse, dans les litiges familiaux transnationaux, qui donne ses recommandations aux tribunaux allemands.

> Le droit à un procès équitable en question

S’il est courant selon l’avocate de la mère française que les juges allemands des affaires familiales imposent des délais très courts pour se présenter face à eux, il est cependant rare qu’aucun document ne soit ainsi rendu accessible pour établir la défense de ses clients. Face à cette situation exceptionnelle, l’avocate de la Française vient de déposer un recours devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), se fondant sur le droit à un procès équitable. L’avocate a cependant peu d’espoir que ce recours ne fonctionne compte tenu de la situation actuelle de confinement et des délais imposés par la cour allemande.

Face à l’urgence de la situation, Enfants Otages a en parallèle contacté le Consulat français à Berlin pour réclamer la présence, à cette audience, d’un représentant français, comme il est prévu dans les textes de la résolution européenne. Selon le président d’Enfants Otages, Alain Joly, « seule la présence du consulat pourra aider cette mère à ne pas perdre son fils mardi. Sa seule vrai faute est de ne pas être allemande ». Selon Alain Joly, le Parlement européen a lui-même reconnu, via sa résolution fin 2018, l’attribution systématique de la garde au parent allemand. « Cette attribution est toujours justifiée par le bien-être de l’enfant qui, d’après la loi allemande, correspond à vivre et grandir en Allemagne chez le parent allemand ».

> Des parents isolés

La mère française avait, d’après son témoignage, fui son domicile avec son fils en début de semaine suite à de nouvelles violences conjugales. Elle avait cependant, selon elle, communiqué, comme la loi l’exige, l’endroit où elle se situait et maintenu des communications régulières entre le père et son fils. La police serait elle-même venue contrôler que son fils était bien hébergé dans de bonnes conditions.

Interrogée, cette jeune mère exprime aujourd’hui sa détresse : « on va me prendre mon enfant sans que je sache de quoi je suis accusée. L’avocate ne va même pas avoir de quoi argumenter. Nous n’avons que des hypothèses, aucun fait ». Elle ajoute : « Je n’ai pas le bon passeport, je suis isolée ».